vendredi 8 août 2014

Dialogue avec une maitresse

Il y a quelques jours je me suis rendue chez des amis qui m'avaient invitée à diner, dans le groupe il y avait une femme sympathique, la cinquantaine jeune et bien portante, un beau métier, elle avait l'air tout à fait épanouie. Au fur et à mesure du repas la conversation filait bon train et joyeuse et puis la femme en question, Agnès, nous a tout à coup informés qu'elle avait un amoureux depuis quelques mois, qu'ils s'étaient rencontrés lors d'un enterrement et qu'ils avaient fait l'objet d'un coup de foudre mutuel ... drôle d'endroit pour tomber amoureux mais, enfin, le coeur a des raisons que la raison ignore !

Agnès s'est mise à nous raconter sa perle rare et tout d'un coup lâcha que le seul hic c'était que le monsieur vivait avec quelqu'un depuis vingt ans mais, ATTENTION, ils n'étaient pas mariés ... comme si le fait qu'ils ne soient pas mariés justifie l'infidélité du monsieur (!?), évidemment les femmes mariées qui étaient présentes ne pensaient pas du tout comme elle, c'est alors qu' Agnès s'est tournée vers moi justement parce que je n'avais rien dit e sûrement dans l'espoir que je m'allie à sa cause, je lui ai demandé ce qu'elle attendait de cet homme et sa réponse a été on ne peut plus claire :

"Je veux les escapades en amoureux, les cadeaux, la gentillesse, l'amour, le sexe, le bon côté de la chose, quoi ! Je ne veux surtout pas m'emmerder avec lui au quotidien !"

C'était lâché et ça a fait mouche ! Les autres femmes, mariées, se sont aussitôt insurgées et moi j'ai éclaté de rire !!!

Il est vrai que, au vu de ma situation, mes amies avaient du mal à comprendre que je puisse en rire, mais Agnès assumait et revendiquait sa condition de maitresse, je n'allais pas lui jeter la pierre. Je leurs demandais donc de se calmer, après tout Agnès n'était pas la maitresse de l'un de leurs maris, pour qu'ensuite on puisse en discuter si elle le souhaitait, évidemment. Eh bien oui, Agnès le souhaitait, elle avait apprécié ma réaction ... elle n'allait pas tarder à le regretter.

Je vais essayer de rapporter notre dialogue avec le plus de justesse possible :

Agnès : Tu comprends, ça nous est tombé dessus sans qu'on s'y attende, il y a eu un déclic dans nos regards quand ils se sont croisés lorsque je lui tendais le goupillon pour qu'il bénisse le cercueil de sa soeur, et ma meilleure amie. Il savait que sa soeur avait travaillé avec moi et m'a téléphoné à mon bureau deux jours après. J'ai accepté que nous nous rencontrions autour d'un café, il m'a raccompagnée et m'a embrassée, le lendemain nous avons diné ensemble, chez moi, et tout naturellement nous avons fait l'amour !
J'étais encore sous le choc de la rencontre, qu'il me fallait déjà cheminer sur les 72 heures suivantes pour terminer dans cette "attraction" qui les avait conduits au lit ... Agnès continua :
Dès que nous nous sommes rencontrés pour prendre un café, il m'a dit qu'il vivait avec quelqu'un depuis vingt ans mais que ce n'était plus le top. Sa compagne s'était laissée aller et il ne se passait plus rien entre eux depuis cinq ans, à part une grande tendresse et un grand respect (sic). Il m'a dit qu'il avait eu quelques aventures, parce qu'un homme a des besoins, mais il n'avait aimé personne et puis en me voyant il s'est dit : "c'est elle" !
Devant mon silence, Agnès m'a demandé : Tu ne dis rien ?
- Eh non, j'attends que tu finisses !
Agnès : J'ai fini, nous filons le parfait amour depuis deux mois !
J'avoue que j'avais un peu de mal à me "rassembler" ! La situation lui semblait tout à fait normale. Autour de la table les hommes se taisaient et les femmes la fusillaient du regard, mais Agnès continuait sereine et souriante, c'était à ne rien y comprendre. C'est là qu'elle a regardé toute la tablée et a lâché :
"Qu'est ce qu'il y a ? Je n'ai tué personne, je suis juste amoureuse ! Il m'aime aussi et nous sommes heureux, nous formons un couple !"
A mon tour de parler, je l'ai fait calmement et un rien amusée :
- Donc tout te semble normal dans votre situation bancale ! Ni toi ne lui ne vous sentez coupable de quoi que ce soit, vous êtes dans votre droit juste parce qu'ils n'auraient plus rien ensemble depuis cinq ans ... Qu'est ce que sa compagne en pense ?
Agnès : Elle n'en pense rien car elle ne sait rien !
- Ah bon ! Donc tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes !?
Agnès : Oui, bien sûr ! Il souhaite juste vendre leur maison, c'est alors qu'il lui dira qu'il la quitte et après chacun reprendra ses billes ! Leurs enfants sont majeurs ou presque (19, 18 et 17 ans), mais comme ils finissent leurs études ils resteront avec elle, c'est normal ! ...
Elle allait continuer mais je l'ai interrompue : C'est normal ? Sa compagne a peut-être son mot à dire avant de vendre leur maison, elle a le droit de savoir ce qui se passe, d'ailleurs leurs enfants ont des droits aussi !
Puis je lui ai assené :
- Laisse-moi te dire que non seulement vous n'avez pas de coeur mais qu'en plus, comme dirait ma fille, vous n'avez pas de figure ! Je suis profondément choquée par tous vos projets, vous ne regardez que vos nombrils voire ton vagin et son pénis ! Vous êtes faits de quelle matière ? Parce que vous êtes totalement inhumains !!!
Agnès a été très surprise de ma réaction, elle estimait qu'il n'y avait pas de quoi fouetter un chat puisque son amant donnerait à sa compagne la moitié de la vente de la maison qu'il avait payée seul, vu qu'elle n'avait repris le travail que depuis quatre ans, avant elle ne fichait rien, elle ne s'occupait que de la maison et des enfants, il lui avait tout donné, il avait fait plus que des concessions, ni elle ni leurs enfants n'avaient jamais manqué de rien et maintenant il était venu le temps de vivre sa vie à lui. 
Puis elle a ajouté :
- Avec sa part il s'achètera un deux pièces et nous voyagerons, mais chacun chez soi, pas question que je me mettre à la lessive, au repassage, à la cuisine ... !

Manifestement elle ignorait que j'étais une de ces femmes qui "n'avaient pas bossé toute leur vie", j'étais rentrée à la maison pour m'occuper de toute l'intendance et des enfants, pendant treize ans j'aurais ainsi "glandé" ! Elle ignorait aussi ma condition de femme trahie et qui avait repris sa vie en main, avant que mon connard-de-futur-ex-mari-menteur-manipulateur-traitre-lâche se fasse la malle pour, lui aussi, "vivre sa vie" ! Mas elle ignorait surtout de quel bois je suis faite ... la belle Agnès n'allait pas tarder à s'en apercevoir !

Très succinctement, et calmement, je lui ai raconté ma vie, ma séparation, les tenants et les aboutissants. Je l'ai fait sans larmes et sans drames, juste en disant la vérité et mes amis en étaient témoins. Agnès me regardait effarée, comme si un crime avait été commis et avec une tendance toute particulière à m'accuser du supposé crime ... Quand j'ai fini elle m'a juste dit :
- J'espère que la copine de mon chéri ne se doute de rien, si elle faisait comme toi ce serait terrible !
- En quoi ce serait terrible ? Tu ne crois pas qu'elle a le droit de se défendre ? Peut-être tu penses que j'ai commis un crime de "lèse-majesté" !? Ai-je lâché - Et elle de me répondre :
- Ben tu ne lui as laissé aucune chance !!!
Du coup c'est moi qui ai du avoir un regard effaré car elle a tout à coup donné l'impression d'être très mal à l'aise ... Je n'ai pas pu m'empêcher de répondre :
- Je lui ai laissé la chance d'être honnête et il ne l'a pas saisie, alors j'ai fait ce que je devais faire sinon ce serait moi qui n'aurait plus aucune chance de vivre et je n'en demande pardon ni à lui ni à personne ! Nan mého !!!

La pintade commençait à me gonfler sérieusement !!!

Ainsi, si j'ai tout bien compris, quand une pintade arrive dans la vie d'un queutard, "l'officielle" devrait s'effacer complètement pour leur laisser le champ libre, elle ne devrait pas faire de vagues, pas se révolter et, au mieux, devrait aller vivre sous les ponts pour que les deux premiers se vautrent dans le sexe et le bien-être, et puis quoi encore ???

Agnès se faisait de plus en plus petite, les mots lui manquaient, les convives restaient silencieux mais amusés car, pour la plupart, ils me connaissaient et savaient parfaitement par où j'étais passée pour en arriver où je suis. Pourtant Agnès cherchait de l'aide dans leurs yeux, histoire d'avoir raison, au moins un peu.

J'ai continué sur ma lancée et lui ai dit que s'ils étaient si amoureux il fallait au moins que son amant soit honnête vis-à-vis de sa compagne, il me semble que c'est le minimum, j'ai suggéré le courage pour faire face et afin que cette femme qui, apparemment, ignore tout souffre le moins possible ; sans oublier leurs enfants communs !

Agnès n'a plus rien dit, elle s'est murée dans le silence avec une moue boudeuse ... et dire qu'elle a 50 ans !!!



"L'épithète doit être la maitresse du substantif, jamais sa femme légitime."

Alphonse Daudet








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