Première trahison - 1

Je vais faire un bond d'une vingtaine d'années et nous épargner ma vie au pays des Bisounours ... Je vivais très bien ma quarantaine bien entamée (et la sienne aussi) quand je me suis aperçue qu'une femme lui tournait autour, mon oeil expert de femme et épouse a senti le danger au premier regard mais, bien sûr, j'étais aussi persuadée que l'homme de ma vie ne me ferait jamais "ça", première et grossière erreur !

C'est en toute confiance que j'ai fait par de ma constatation à mon époux bien aimé (ce fut ma deuxième erreur), bien entendu il m'a répondu que c'était absurde et dénué de tout fondement mais ... je n'étais pas d'accord, mon instinct ne me trompait pas et je tenais bon (re-idiote). Il se trouve que mon époux déjeunait tous les jours dans le "restaurant" appartenant à la mère de "dame" en question, "restaurant" où travaillait également le mari de la "dame" en question, ils se voyaient donc du lundi au vendredi, voire au samedi car mon époux allait souvent au bureau le samedi.

Un aparté s'impose : pourquoi j'ai écrit restaurant et dame entre guillemets !? Parce qu'en fait de "restaurant" c'était une gargote infâme dont tous les personnages (clients y compris) relevaient de la cour des miracles et que la "dame" était en fait un pur produit de la gargote, ponctuant ses phrases de vulgarités et obscénités, par conséquent, et dorénavant, je l'appellerait la gueuse, c'est un adjectif qui la caractérise totalement.

Les mois passaient et une amitié naissait entre mon époux et le couple de gargotiers et famille, j'y étais farouchement opposée, non pas que je me sente supérieure à qui que ce soit mais parce que c'était vraiment d'un niveau très bas, ils ne me plaisaient pas et plus la gueuse essayait de se lier d'amitié avec moi, plus je la repoussais !

Un jour d'été, le couple de gargotiers nous ont invités à dîner chez eux, je ne voulais pas y aller mais mon époux m'a dit que j'étais ridicule, que bien que dépourvus de culture c'étaient des gens gentils et qu'il ne me connaissait pas ce genre de préjugés, que, de plus, je n'avais rien à craindre : "crois-tu ma chérie que je pourrais te tromper un jour ? Et avec une femme pareille ? Mais tu divagues, je n'aime que toi et ... bla bla bla" ... Je suis allée au fameux dîner et je n'ai pas été déçue !

Ah le dîner !!! Eh bien le dîner était à leur image, pas de nappe sur la table, l'essuie-tout en guise de serviettes de table, les litrons bien alignés, le saucisson pour l'apéro et l'apéro : du pastis tiens ! Et moi je n'aime pas ça, "c'est pas grave, bois un coup de rouge, ça passe bien avec le sauciflard" ... après, ben après un "barbeuc" ... et un autre litron !!! Je ne savais plus si je devais pleurer ou rire jusqu'au moment où le mari de la gueuse a apporté un petit rosé de Provence bien frais, ça m'a requinquée pour me rendre compte de la suite ...

Je suis de nature expansive et volubile mais ce soir là j'ai surtout écouté et je me suis rendue compte que la gueuse savait beaucoup de choses sur notre vie, elle n'avait pas pu les deviner par conséquent ça ne pouvait lui avoir été confié que par mon mari. De plus, quand monsieur (mon mari) parlait elle buvait ses paroles, mais si SON mari parlait elle lui disait "ta gueule, t'es trop con" et lui reprenait un coup de rouge et du sauciflard !

 

 Mais si la gueuse buvait ses paroles, mon époux faisait le paon, jouait à l'homme d'affaires qui sait mener sa troupe, qui donne tout à sa femme et à ses enfants, un jeu de rôles où la gueuse devenait Cendrillon devant le Prince Charmant qui à son tour jouait le Patriarche muri par la décennie des 40 ans ... et là j'ai eu la certitude qu'il y aurait de gros problèmes avec ces gens là, car le mari de la gueuse ne voyait rien et moi je voyais trop.

Quand, enfin, nous sommes rentrés j'ai signifié à mon époux que je ne voulais plus revoir ces gens, je lui ai conseillé d'en faire autant et lui ai prédit que sinon il courait au-devant de très gros ennuis (troisième erreur) ! Il m'a promis de faire attention et j'ai compté sur les vacances pour que tout cela se tasse.